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Guerre en Ukraine : une marge de négociations limitée pour les entreprises

Actu syndicat Date de publication : 28/03/2022

Le 16 mars dernier, Jean Castex, le Premier ministre, a annoncé un nouveau plan d’aide dit « de résilience économique et sociale » pour aider les ménages et les entreprises françaises à faire face au choc de la guerre en Ukraine. Ce plan s’appuie largement sur la formule testée durant la pandémie et à la sortie du premier confinement : mise en place d’un PGE, chômage partiel, non-application des pénalités de retard dans les marchés publics et utilisation de la clause de révision des prix. Voici pour la théorie. Dans la pratique, de nombreux marchés publics ont été conclus sans clause de révision, malgré l’obligation découlant de l’article R 2112-14 du Code de la commande publique. Quant aux marchés privés, la réglementation en vigueur n’oblige pas véritablement le maître d’ouvrage d’aboutir à un accord avec l’entreprise titulaire du marché. A la lumière de ces éléments, quelle est donc la réelle marge de manœuvre des entreprises ? Jacques Fournier de Laurière, Président honoraire à la Cour Administrative d’Appel de Paris et spécialiste du droit des contrats, fait le point.

Clause de révision obligatoire sous certaines conditions

Jacques Fournier de Laurière

Premier élément à prendre en compte : les marchés d’une durée d’exécution supérieure à trois mois, qui nécessitent pour leur réalisation le recours à une part importante de fournitures, notamment de matières premières, dont le prix est directement affecté par les fluctuations de cours mondiaux, comportent une clause de révision de prix (en application des dispositions de l’article R. 2112-13 du code de la commande publique). A ce titre, le ministère de l’Economie considère qu’une proportion de plus de 10% de fournitures concernées par ce risque dans un marché rend la clause de révision obligatoire. De nombreuses entreprises du BTP peuvent donc faire valoir cette obligation, avance Jacques Fournier de Laurière.

Circulaire du 1er ministre du 16 juillet 2021 parfaitement transposable

Il est à souligner que, par ailleurs, le Premier ministre demande aux maîtres d’ouvrage publics :
– d’appliquer la théorie de l’imprévision pour les marchés publics
– et de ne pas appliquer les pénalités de retard dans le cas de délais complémentaires dus à des difficultés prouvées d’approvisionnement.

De façon plus générale, les entreprises concernées doivent s’appuyer, dans leurs demandes auprès des maîtres d’ouvrages publics, sur l’article R 2194-5 du Code de la Commande Publique et/ou sur l’article 54 du CCAG Travaux. Il est à noter, en outre, que la note en date du 27 mai 2021 de la DAJ et la circulaire du Premier ministre du 16 juillet 2021 sont parfaitement transposables à la situation actuelle. « Selon nos informations et en complément de ces bases juridiques, le Gouvernement devrait publier très rapidement une nouvelle circulaire visant à assouplir les conditions de recours à la théorie de l’imprévision dans les marchés publics », ajoute l’ancien Président honoraire de la CAA de Paris.

Contrats privés : faire valoir le principe d’imprévisibilité

En ce qui concerne les contrats de droit privé, le ministre de l’Économie a invité les entreprises à faire valoir le principe d’imprévisibilité pour justifier, dans le cadre d’un dialogue de bonne foi avec le client, une révision du prix fixé initialement. Ces éléments valent sur les deux types de hausses de prix (énergie et matériaux), ainsi que sur l’allongement des délais d’approvisionnement. « C’est l’article 1195 du Code Civil qui précise, depuis la réforme des contrats de 2016, les conditions de mise en œuvre de la théorie de l’imprévision dans les contrats privés, indique Jacques Fournier de Laurière. Si un changement de circonstances imprévisible, lors de la conclusion du contrat, rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation », complète-t-il.

Pas d’obligation d’aboutir à un accord

Qu’en est-il en cas de refus ou d’échec de la renégociation ? « Les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation, répond Jacques Fournier de Laurière. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe. Il n’y a donc aucune obligation pour le maître d’ouvrage privé d’aboutir à un accord avec l’entreprise titulaire du marché », conclut-il.
En cas de désaccord persistant, l’entreprise n’a d’autre possibilité que de porter le différend devant le tribunal compétent. Mais la jurisprudence judiciaire est manifestement stricte dans la mise en œuvre de ce principe. La marge de manœuvre est donc faible. De surcroît, la possibilité d’invoquer le principe de l’imprévision dans un marché privé n’est envisageable que si l’application de l’article 1195 du Code Civil n’a pas été exclue par les clauses contractuelles du marché en question…

Pression du gouvernement

Demeure l’appel à la solidarité entre les acteurs lancé par le gouvernement. La médiation des entreprises est mandatée pour lutter contre les abus et pour vérifier que les règles encadrant les relations commerciales sont respectées. « Les entreprises doivent renégocier leurs contrats, s’il n’y a pas de solidarité de filière, les plus petites sociétés vont souffrir, c’est ce que nous voulons éviter », a prévenu Bruno Le Maire. Sur ce terrain, le gouvernement devrait réactiver très rapidement les cellules d’intervention au niveau préfectoral pour gérer dans les meilleurs délais les situations les plus critiques. La pression du gouvernement sur les entreprises pour qu’elles adoptent une éthique de comportement en cette période troublée n’a aucune base légale, mais il ne faut pas la négliger.

© EGF

Les Entreprises Générales De France Du Batiment Et Des Travaux Publics

EGF est l’organisation professionnelle des entreprises générales qui livrent des ouvrages « clé en main ». Créée en 1903 pour promouvoir le matériau béton, elle a depuis élargi ses activités à tous les sujets et activités qui conditionnent la vie et le progrès des entreprises générales.
EGF fonctionne grâce à ses entrepreneurs impliqués dans des instances nationales et régionales. Ses adhérents regroupent sur le territoire un millier d’entreprises de tailles très différentes, de la PME au grand groupe en passant par les ETI.
Les EG totalisent 20 Mds d’€ de CA environ en France et près de 80 000 collaborateurs dans l’hexagone.
Grâce à leurs compétences en ingénierie, les entreprises générales peuvent travailler en amont et en aval des projets pour optimiser les budgets, sécuriser les réalisations, s’engager sur des résultats et de la performance au travers des contrats globaux , mais aussi en RSE.
Signataire d’un Pacte RSE depuis 2018, les entreprises du syndicat s’engagent à :
– veiller à construire durable et responsable
– dynamiser l’économie locale et soutenir l’emploi de proximité
– maintenir un rythme soutenu d’embauches
– développer des heures d’insertion dans leurs marchés,
– associer tous les acteurs du chantier pour le progrès social
En conclusion : mettre l’homme au coeur de leurs préoccupations.

Photo : © Cyrille Dupont/Eiffage

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